Bonjour Rosalie, est-ce que vous pourriez vous présenter ?
Bonjour, Je suis Rosalie Péricaud, 30 ans. Artisane métallière et architecte, je travaille dans mon atelier de Saint-Denis, tout proche de Paris.
Quelle est votre pratique et depuis quand y travaillez-vous ?
Je suis architecte depuis 2013, et chaudronnière depuis 2018.
Je crée des choses en métal. Mon travail se situe à la frontière du design et de l'art. Je conçois et dessine mes projets : des pièces uniques, ou des petites séries. Je passe du coup de crayon sur un carnet au coup de marteau à l'atelier.
Je travaille seule, notamment à partir de commandes de particuliers ou d'architectes, ou bien je propose à la vente des créations.
Comment êtes-vous arrivée là ?
J'étais architecte depuis 5 ans, et je voulais apprendre à souder. Je me suis dit que ce serait plus facile en tant que femme d'apprendre via une école, que de demander à quelqu'un de m'apprendre. Je me sentais plus légitime et j'espérais éviter des remarques machistes grâce à l'obtention du CAP. J'ai donc suivi les cours du soir de la Mairie de Paris en Chaudronnerie pendant deux ans, en parallèle de l'architecture la journée. Le travail du métal m'a tellement plu que j'ai troqué l'architecture pour l'artisanat. Je suis passée du bureau à l'atelier. C'était un gros changement de cadre de vie, mais aussi un infini bonheur. Mon métier est assez similaire à celui que je faisais en tant qu'architecte. Je conçois, dessine, conseille, budgétise. Mais cette fois c'est moi qui fabrique.
Quels sont les médiums que vous utilisez ?
Après l'imagination, mes mains sont les principaux outils. Petit à petit j'équipe l'atelier. Les outils vont du stylo ou de l'ordinateur pour les esquisses ou 3D, à tout un tas de machines cracras et bruyantes à l'atelier.
Qu'est-ce qui définit votre travail ?
Le dessin est minimaliste, fin. Les objets sont composés en formes graphiques et utiles. Le matériau est mis en valeur, dénudé, mais épuré.
Travaillez-vous sur d'autres projets extérieurs ?
Je n'ai pas suivi un cursus classique, ni travaillé dans une entreprise de chaudronnerie. J'ai du mal à voir les limites précises de mon métier. Je me crée mon propre univers de travail, à tâtons, en suivant mes intuitions. J'ai par exemple travaillé avec Cécile Massou, scénographe, sur la conception et la réalisation d'un gradin circulaire démontable pour un spectacle de cirque. Je suis ouverte à toutes sortes de collaborations
Une création pour nous faire rentrer dans votre univers ?
Cette table oppose le plateau d'une extrême finesse, et les pieds ancrés dans le sol. Les deux tôles soudées et pré-contraintes permettent d'enlever toute structure complémentaire. Le plateau est limité à une simple surface. Cette table a sa déclinaison format table basse. La massivité du matériau métal est opposée à la finesse et au minimalisme du plateau. L'acier est patiné et huilé.
Pouvez-vous nous parler de votre processus de création ?
Si l'objet part d'une commande, je rencontre le ou la cliente pour révéler les besoins, les envies, les contraintes. Je propose ensuite un dessin, un croquis, ou une vue 3D avec le devis. Je fais les dessins techniques et je règle les détails de montage. La fabrication se fait à l'atelier. Je confronte l'intuition du dessin et la réalité des matériaux à échelle 1. Découper, plier, souder, poncer, patiner, huiler. Pour mettre en forme et révéler. La création est un dialogue entre envies, imaginaire, jeu de formes et de matières.
Quelles sont vos sources d'inspiration? Comment arrivez-vous à rester créative ?
J'aime bien jouer avec des sensations d'espaces. Représenter des jeux de tensions, confronter les matières. Le point de départ est souvent des souvenirs d'espaces ou de paysages. Dès que je regarde un objet que j'aime j'essaie de savoir pourquoi il me plaît, ce qu'il raconte. Et puis je passe mon temps à faire des petits gribouillages d'idées pour ensuite les tester à l'atelier.
Quels sont vos futurs projets ?
J'ai de jolies tables à fabriquer. Une étagère aussi. Une échelle. Je dois aussi terminer une série de planètes à suspendre. Ce sont des ronds patinés à accrocher au mur.
De quoi vous ne pourriez plus vous passer ?
Je ne pourrais me passer ni de mes mains ni de mes yeux.
Un livre ou une émission à nous conseiller ?
J'ai adoré King kong théorie, de Virginie Despentes. Ça m'a donné du courage dans le montage de mon projet en solitaire, et de la force face aux remarques frôlant la misogynie dès que je rentre dans un magasin de bricolage.
Un compte Instagram qui vous inspire ?
fashion_for_bank_robbers
20/11/2020
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